Ecriture

Le Mois de l’écriture avec Kobo 2024

Je participe cette année au Mois de l’écriture.

Chaque jour, je posterai le texte écrit pour l’occasion, en plus de sa publication sur Instagram.

Tu ne connais pas le challenge ?

Le Mois de l’écriture est de retour 🖋🎉
Avis aux écrivains et écrivaines en herbe ou confirmés ! En novembre, la plateforme d’autoédition @kobo.writing.life.fr et l’école d’écriture @lesmots.co vous proposent de prendre la plume pour une série de challenges littéraires.
Chaque jour, composez un petit texte incluant le mot imposé de notre liste pour prendre de l’assurance, déployer votre créativité et intégrer l’écriture dans votre routine quotidienne. 

Le Mois de l’écriture en bref :
🌟Quoi ? Chaque jour, écrivez 250 à 750 signes en incluant le mot imposé de notre liste. 
🌟Quand ? Du 1er au 21 novembre 2024. 
🌟Où ? Postez vos compositions sur les réseaux en nous taguant #Ecrireaveckobo et #EcrireavecLesMots ou directement sur le compte de @kobo.writing.life.fr

01.11.2021 – Bretagne

Sa cuillère brise la croûte ambrée et brillante. Quand elle la porte à son visage, les effluves de caramel chatouillent ses narines. Elle ferme les yeux et entrouvre les lèvres pour y déposer le kouign-amann. L’équilibre est parfait entre le croustillant et le moelleux, entre le sucre et le sel. Le goût du beurre chaud se répand sur sa langue, excite ses papilles et réveille le souvenir de sa grand-mère. Le temps d’une bouchée, elle pourrait presque croire qu’elle est à nouveau là-bas, avec elle, dans ce coin de Bretagne où elle a grandi. Elle rouvre les yeux et avance, contournant la terre fraîchement retournée. Elle pose une main sur la pierre tombale et murmure : « Kenavo, Mamig. Me az kar ».


02.11.2024 – Cavalcade

— Jarjille. Mot compte double. 44 points.
— Ce mot n’existe pas.
— Ma grand-mère le disait tout le temps ! “Cette matrû est une vraie jarjille, elle me fout la lourde”.
— En quelle langue parles-tu ?
Haussement d’épaules.
— “Jarjille” n’est pas valide au Scrabble. Pose autre chose.
— Que veux-tu que je fasse avec deux “J” ?
— Tu n’as qu’à poser “jarre” ici. 12 points.
— Ce jeu est nul.
— On a bientôt fini. Et avec mes lettres à 1 et 2 points, je ne vais pas faire grand chose.
Pause.
— Oh punaise ! “Cavalcade”. Le C compte double, deux “mot compte triple”, ça fait… 135 points. Les 7 lettres d’un coup, 50 points bonus.
Soupir.
Cri de joie.
— OK, j’y vais, mais la prochaine fois, on fait shifumi pour décider qui change la couche du bébé.


03.11.2024 – Emberlificoter

Il ne comprenait pas comment il s’était retrouvé mêlé à toute cette histoire. Les souvenirs de la veille étaient plutôt flous, il fallait l’avouer. Il se rappelait être sorti au bar, comme tous les vendredis soirs. Il avait commandé un whisky, pur, sans glace, et c’est là qu’elle s’était matérialisée. Une beauté fatale incendiaire dans sa robe fendue jusqu’au creux de la hanche. Elle s’était intéressée à lui. Sincèrement. Comme aucune autre ne le faisait jamais. Un verre en avait entraîné un autre et elle l’avait emberlificoté, bercé de douces paroles. Quant à la suite… L’avait-il suivi chez elle ? Comment s’était-il trouvé là, attaché à ce lit, pieds et poings liés, empêtré dans ces draps couverts de sang ? Son sang.


04.11.2024 – Rouille

Voilà, elle y était. Ce moment, comme elle l’avait redouté, avait un goût amer. L’heure de donner le dernier coup de clé était venu. Elle avait passé un coup de balai, plus pour repousser l’instant fatidique que par réel souci d’hygiène. Les volets étaient clos, l’eau et l’électricité coupés. Il ne restait plus que cette fichue porte qui lui tenait tête. Elle soupira. Combien de fois lui avait-elle demandé tant de fois de graisser les gonds, d’huiler le mécanisme… Maintenant, il était trop tard. Prise dans une rouille tenace, la serrure grinçait et faisait de la résistance. Comme si la maison se rebellait, refusant d’être abandonnée aux mains d’une autre. Le pêne céda dans un claquement sourd, enfin. Il était temps de tourner la page.


05.11.2024 – Chaudron

Un râle monte dans les gradins. L’arbitre siffle la faute de l’équipe adverse, coup de pouce inespéré. Il ne reste qu’une minute de jeu. Tout peut basculer sur son action. Mise en place, pose du ballon au sol. Regards, calculs de trajectoire, alignement des coéquipiers qui devrait faire le reste. Il le sait, sa passe est décisive. Prise de recul, trois pas en arrière. Paupières closes, inspiration, courte prière au dieu Maradona, expiration. Il relève la tête, visualise son geste, accélère, frappe. La balle blanche et verte s’élève dans les airs, vrille, atterrit sur le crâne du numéro 10 qui la renvoie aussitôt. Le gardien se jette sur le côté, une fraction de seconde trop tard. Son gant effleure à peine le projectile qui s’échoue dans le filet. Le Chaudron est en liesse. Trois coups de sifflet. Fin du match. Ils l’ont fait. Ils retrouveront la Ligue 1 l’année prochaine.


06.11.2024 – Indulgent

Ils ne comprennent pas. Ils ne peuvent pas. Ce n’est pas leur faute, ils ne savent pas ce que c’est. Ils ne portent pas le poids d’un tel fardeau. Ils ne voient pas le regard mêlé de dégoût que les autres posent sur moi. Ils s’efforcent de se comporter comme avant. Ils s’entêtent à me dire d’être indulgente envers moi-même. Comment le pourrais-je ? Ils me répètent que c’est un accident et que d’ici quelques temps, tout sera effacé. C’est peut-être vrai, mais en attendant, ce n’est pas eux qui doivent sortir avec les cheveux verts pour avoir testé une recette TikTok de coloration maison.


07.11.2024 – Epiphanie

Il ne la connaissait que depuis trois jours et il marchait clairement à côté de ses pompes. Leur rencontre aurait pu être un scénario de comédie romantique s’il n’y avait pas eu les circonstances.
Il comptait les heures jusqu’à leur prochain rendez-vous.
Il avait hâte et à la fois, pas tant que ça.
Il enfila son plus beau costume, celui des grandes occasions. Il noua une cravate rouge qui ne manquerait pas de faire sourire sa mère. Il enfila ses souliers fraîchement cirés et se recoiffa du bout des doigts avant de partir.
Il allait enterrer son père. Et malgré la tristesse qui serrait sa poitrine, il était heureux. Parce qu’il allait revoir la conseillère funéraire qui avait ranimé son cœur meurtri.


08.11.2024 – Pompe

Il ne la connaissait que depuis trois jours et il marchait clairement à côté de ses pompes. Leur rencontre aurait pu être un scénario de comédie romantique s’il n’y avait pas eu les circonstances. Il comptait les heures jusqu’à leur prochain rendez-vous. Il avait hâte et à la fois, pas tant que ça. Il enfila son plus beau costume, celui des grandes occasions. Il noua une cravate rouge qui ne manquerait pas de faire sourire sa mère. Il enfila ses souliers fraîchement cirés et se recoiffa du bout des doigts avant de partir. Il allait enterrer son père. Et malgré la tristesse qui serrait sa poitrine, il était heureux. Parce qu’il allait revoir la conseillère funéraire qui avait ranimé son cœur meurtri.


09.11.2024 – Sanglot

Trop, c’est trop ! J’en ai plus qu’assez de ses jérémiades.
— Arrête de te mettre dans des états pareils, c’est ridicule.
Ma sœur tente d’articuler entre deux sanglots :
— Tu ne peux pas comprendre, tu as un cœur de pierre !
— Au dernier check-up, le médecin n’a rien remarqué.
Elle lève les yeux au ciel.
— C’est un psy que tu devrais aller consulter. Lui verrait qu’il ne bat pas correctement.
— Pourquoi donner 50 € à un type qui va inventer des problèmes où il n’y en a pas ?
— Peut-être pourrait-il expliquer pourquoi tu ne pleures jamais ?
— Il vaudrait mieux comprendre pourquoi toi, tu pleures pour un rien.
— Un rien ? Mais sa femme est morte !
Ses pleurs reprennent de plus belle tandis que je soupire.
— Rose, c’est une pub Intermarché…


10.11.2024 – Cime

L’arrière de la voiture chasse au beau milieu de la courbe du virage. Coup de volant dans le sens contraire.
Première erreur.
Emporté par une force invisible, mon véhicule fait un 180° et part en glissade arrière. Par réflexe, j’appuie lourdement sur la pédale de frein.
Deuxième erreur.
Les pneus dérapent en zigzag sur la chaussée.
Bêtement, je ferme les yeux. Comme si ça pouvait m’aider…
La voiture est freinée dans son élan, puis un impact me secoue et la gravité me tire en arrière.
Plus rien ne bouge.
Je rouvre les yeux et aperçois, à travers le pare-brise, la cime des sapins blanchis.
Ma voiture plantée dans le fossé, je fais une note mentale : si une mamie devant moi roule doucement sur la neige, ce n’est pas une raison pour la doubler.


11.11.2024 – Murmurer

Enfin, les paupières se ferment. Voilà plus d’une heure qu’il lui murmure toutes les berceuses qu’il connaît, c’est-à-dire une. Do do, l’enfant ne voulait vraiment pas faire dodo ce soir. Ils avaient passé la journée à arpenter la ville parée des décos de Noël. Il aurait pensé que sa nièce tomberait dans les bras de Morphée en moins de temps qu’il n’en faut pour choper un rhume. Il compte jusqu’à cent pour être certain qu’elle ne se réveille pas. Pas plus, sinon c’est lui qui va piquer du nez dans le petit lit. Il s’éloigne à pas feutrés, sur la pointe des pieds. Il est presque sorti de la chambre quand un couinement déchire le silence de la nuit. Il grimace mais déjà un cri s’échappe du berceau. Fichue girafe abandonnée sur le sol…


12.11.2024 – Quadrilatère

— Mais tu comprends rien, j’te dis !
— Arrête de crier, laisse-moi réfléchir au problème…
— J’aurais dû demander à papa, je le savais.
— Oui, eh bien, ton père n’est pas là. Donc tu vas devoir de te contenter de moi.
Soupirs exagérés.
— Alors, reprenons calmement. Lis.
— Considérons une table rectangulaire…
— Jusque là, OK…
— Arrête de m’interrompre, tu vas encore oublier la moitié des infos.
Soupirs.
— … sur laquelle est placé un napperon en forme de quadrilatère. L’aire de ce napperon est égale à la moitié de celle de la table et ces sommets touchent un bord de la table. Dessiner les figures et émettre des hypothèses.
Silence.
— Mais franchement, qui a encore des napperons en 2024 à part ton sadique prof de maths ?


13.11.2024 – Attendri

Elle avait toujours préféré préparer elle-même ses pièces de viande. Elle les aimait attendries, après quelques coups de maillet pour détendre les chairs. Elle avait un penchant insatiable pour la langue et le foie, organes méprisés par les non-gastronomes. Quand elle s’attelait à sa tâche, elle s’y prenait délicatement, découpant finement les morceaux, suivant les lignes des muscles. Tout était dans le geste du couteau. Sa mère lui avait toujours répété qu’il fallait respecter la nourriture. Elle appliquait cette règle à la lettre. Après tout, il fallait bien honorer l’homme sacrifié sur l’autel de sa gourmandise.


14.11.2024 – Oraison

Il m’avait prise par les sentiments parce qu’il savait que je ne pourrais pas le lui refuser. Il avait insisté : « On sera entre nous, pas de chichis, pas de pression ».Et voilà comment je me retrouve là, devant ses amis et quelques visages inconnus. Les regards sont braqués sur moi. Tous ne me connaissent pas. Tout juste ont-ils dû apercevoir ma photo… J’ai revêtu la tenue de notre premier rendez-vous, comme un hommage. Le vert d’eau de ma robe se mêle avec l’océan en arrière-plan, le vent ébouriffe mes cheveux et un pâle soleil caresse ma peau. J’imagine que l’image est belle… Je me tiens droite devant lui. Il ne dit rien. J’esquisse un sourire triste et prononce les premiers mots de son oraison funèbre.


15.11.2024 – Plume

Telle une plume au vent, ma concentration s’envole et son ennemie jurée, Dame Procrastination s’installe sur le perchoir. Telle une plume au vent, ma volonté s’est fait la malle et n’a pas laissé d’adresse. Telle une plume au vent, mes personnages dansent dans ma tête et se battent pour occuper le clavier. Telle une plume au vent, je jongle de nouvelle en nouvelle, jetées ici comme des bouteilles dans la mer de la créativité. Quand retrouverai-je le courage de prendre à nouveau la plume ?


16.11.2024 – Incendie

L’une avait suggéré une trêve puisque leurs familles passeraient Noël ensemble.
L’autre l’avait invitée pour signer le traité de paix, ne serait-ce que temporaire.
L’une sonna à la porte à l’heure dite.
L’autre lui ouvrit grand la porte et les bras.
L’une alla s’asseoir au salon et patienta.
L’autre revint avec une bûche pâtissière et du café.
L’une se moqua intérieurement de jouer les cobayes.
L’autre lui servit une part généreuse, sachant qu’elle ne résisterait pas à un dessert au chocolat.
L’une remercia, porta une bouchée à ses lèvres et avala goulûment.
L’autre sourit et attendit.
L’une sentit l’incendie du piment se propager dans sa trachée et lui arracher des larmes.
La guerre était relancée.


17.11.2024 – Demi

À demi-mot, il lui annonça qu’il avait rencontré l’amour, le Vrai. Il n’avait jamais rien fait dans la demi-mesure, ce n’était pas aujourd’hui qu’il allait commencer. Quand elle demanda si elle la connaissait, il avoua qu’il s’agissait de sa demi-sœur. Il confessa s’être rapproché d’elle lors de la demi-finale du championnat de foot des enfants. Ils avaient passé la dernière demi-heure à se dévorer des yeux avant de se sauter dessus derrière les gradins. Elle hurla, lui envoya un crochet du gauche et fit demi-tour. De retour chez elle, elle avala un demi-litre de vodka, la boîte de somnifères et sombra d’un sommeil sans rêves et sans fin.


18.11.2024 – Translucide

Dimanche 17 novembre, 11 h.
Le parrain du salon, un grand gaillard aux cheveux aussi bruns que son sourire est large, s’empare du micro. Dans sa main, cinq enveloppes en kraft.
Première récompense à être décernée : celle du roman Jeunesse.
Je suis en train de dédicacer l’ouvrage dont le nom est annoncé dans le haut-parleur. Mon nom suit dans la foulée.
Je jette un regard gêné à la femme qui se tient face à moi.
Souriante, elle me dit d’y aller. Qu’elle attend.
Je me lève et marche, fébrile, jusqu’à l’estrade.
Une, deux, trois, voilà. J’ai monté les marches sans tomber.
L’organisatrice, solaire et rayonnante, me tend le trophée en verre translucide sur lequel est gravé : Lauréat prix Une mine de livres 2025.
Mon premier prix.
Quelle fierté !


19.11.2024 – Agripper

Quand elle ferme les yeux, elle revoit le tout petit être lové dans ses bras qui agrippait son sein avec avidité. Elle repense aux premiers sourires, aux premiers mots, aux premiers pas. Elle se rappelle la période du “non” et des caprices, celle des disputes dans la cour de la récré et des pleurs le soir sur l’oreiller. Aujourd’hui, sa fille devenue presque femme ôte le rouge de ses lèvres là où elle débarbouillait le chocolat du goûter. Elle lui pique toujours ses chaussures à talons, mais ne tombe plus en marchant. À la place du rideau dont elle coiffait auparavant sa tête, elle a fixé un léger voile recouvrant ses longs cheveux blonds. Elle n’est certes plus une enfant, mais elle restera toujours son bébé.


20.11.2024 – Tribune

De là où j’étais, je ne distinguais rien. Pas même les tribunes qui étaient pourtant pleines à en croire les ventes de la billetterie. J’aimais l’ambiance qui régnait juste avant le début du show. Je me terrais, invisible derrière l’écran vidéo. Je me gorgeais des clameurs qui montaient de la fosse, je prenais le pouls des spectateurs. Je les observais avant qu’ils ne s’emparent de moi, qu’ils me prennent toute mon énergie. Toute mon âme. Sans eux, je n’existais pas. Pour eux, pour ressentir leur amour, j’étais prêt à tous les sacrifices. Même celui de ma propre vie.


21.11.2024 – Eblouir

Nous voilà déjà à la fin de ce challenge d’écriture… Je ne sais pas si ma prose vous a éblouis, mais j’ai pris beaucoup de plaisir à me creuser les méninges. Certaines fois, j’ai été plus créative que d’autres, je dois l’avouer ! Mettez-vous à ma place, l’inspiration ne frappe pas toujours quand on est derrière la porte. Alors, plutôt que d’attendre l’arrivée d’une muse divine et capricieuse, j’ai pris le taureau par les cornes et le clavier par la main. Je n’allais pas me laisser abattre si facilement. Personne n’a jamais dit qu’écrire était facile. Cela ressemble parfois à une descente à vélo, sans les freins, avec un bandeau sur les yeux. C’est excitant, terrifiant et réjouissant. En un mot : essentiel.